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Lanael Logan
3 janvier 2013

L’Amant, la femme…et le mari

Je n’étais pas vraiment en avance, mais je freinais ma course devant le bâtiment. La grande messe du lundi matin allait commencer. Essoufflé, je pressais le pas pour rejoindre l’ascenseur, la chemise à moitié sortie du pantalon par l’effort fournit. J’allais devoir me rafraîchir avant de gagner cette maudite réunion de service hebdomadaire.

-Nicolas, vous tombez bien! m’interpella le directeur. Je grognais de dépit, mais il ne m’entendit pas.

Il se dirigeait vers moi, accompagné d’une jeune femme brune.

-Je vous présente Marion, notre nouvelle publicitaire. Elle est en charge de promouvoir la société. Avec elle, la liste de nos prospects va décoller. Je compte sur vous pour qu’elle se sente bien, bichonnez là. Et présentez-là à vos collègues, je ne peux pas rester ce matin, me déclara-t-il,s'éloignant déjà.

Il nous planta là sans plus de commentaires. J’invitais donc sans conviction notre nouvelle collaboratrice à me suivre. Je la traînais jusqu’à mon bureau pour récupérer mes dossiers, puis jusqu’à la salle de conférence, sans passer par la case miroir et lavabo. Sur ce trajet, elle me posa un tas de questions, sur mes fonctions, sur les collaborateurs avec lesquels je travaillais, l’ambiance. Je ne pouvais pas la planter là pour me rendre présentable et je détestais paraître débraillé. Elle m’agaçait, comme toute les femmes d'ailleurs. Mais au final, je répondis poliment, me souvenant de mes débuts difficiles ici même. Elle sourit quand je lui révélais que j’étais un des créatifs. Elle me fit la remarque que nous allions donc souvent travailler ensemble. Il ne me manquait plus que ça.

Je débutais la réunion en excusant le directeur, puis en la présentant, et je laissais finalement la parole à l’intervenant du jour pour m’installer confortablement. La réunion était en général assez longue. J’observais discrètement la petite nouvelle, comme chacun. Je m’aperçus rapidement que ses voisins lui faisaient du pied. Elle semblait mal à l’aise, se tortillant sur sa chaise. Mieux valait elle que moi, j'avais déjà donné avec toutes les filles du service.

Elle était plutôt mignonne ainsi. Je souris, en pensant à mon compagnon, Mathieu qui devait rentrer de déplacement dans les prochains jours. Ça faisait trois mois que nous ne nous étions pas vu et il me manquait. Il se moquerait de moi si je lui avouais que j’avais trouvé une femme agréable à regarder.

La réunion se terminant, je me réfugiais dans mon bureau pour ne pas avoir à aller déjeuner avec les autres. Ils ne m’aimaient pas.

Un toc discret à ma porte me fit relever le nez du dossier sur lequel je travaillais. Marion passait sa tête dans l’entrebâillement:

-Vous ne venez pas déjeuner? demanda-t-elle d’une petite voix.

-Non, je vous remercie, répondis-je.

Elle s’introduisit dans la pièce sans avoir été invitée et s’assit sur la chaise en face de moi.

-Est-ce que je peux me cacher ici? me supplia-t-elle

Je la regardais, surpris. Mais je pouvais la comprendre.

-La réunion…bien sûr, il n’y a pas de problème. Si vous souhaitez déjeuner avec moi, je descendrais d’ici dix minutes. Je connais un «salad bar» ou l’on est tranquille en général, proposais-je, compréhensif.

-Avec plaisir, dit-elle en soupirant de soulagement.

Nous passâmes ainsi la pause déjeuné, discutant de choses et d’autres dans mon repère secret. Mes collègues homophobes n’y mettaient jamais les pieds. A la fin du repas, elle déposa un baiser léger sur mes lèvres, puis me remercia. Je sursautais sans rien dire, avant de l’inciter à regagner nos bureaux respectifs.

J’étais déconcerté. Son baiser m’avait électrisé.

 

Les jours passèrent ainsi. Elle s’échappait discrètement pour déjeuner en ma compagnie. Et à chaque fin de repas, elle m’embrassait, sans que je fasse le moindre geste pour la repousser. Je pensais à Mathieu. Je ne savais plus quoi faire. Il me manquait tellement. Mais elle m’attirait de plus en plus. J’avais peur de la faire fuir si je lui avouais la vérité.

La solution arriva d’elle-même, lorsqu’un collègue nous surpris.

-C’est la meilleur, l’homo qui se tape la petite nouvelle, ça va jaser au bureau!

Marion me regarda, elle avait l’air surprise. Je ne baissais pas les yeux, je n’avais pas honte de ce que j’étais, au contraire. Elle me sourit doucement, et regagna la société seule, bousculant le malappris au passage. Il me raccompagna de ses sarcasmes jusqu’à ma porte, mais ne poursuivit pas car il avait un rendez-vous. Je me réfugiais dans la pièce et soupirais de soulagement.

Je sursautais quand mon fauteuil pivota, révélant Marion qui s’y était cachée.

-Tu aurais pu me le dire. Je comprends mieux pourquoi tu ne réponds pas à mes avances, dit-elle.

Je fermais par réflexe la porte de mon bureau à clef et m’assis sur la chaise qu’elle avait occupée quelques jours plutôt.

-Non, c’est plus compliqué, répondis-je juste en prenant ma tête entre mes mains. Mathieu n’allait pas du tout apprécier, mais je n’en pouvais plus. Je ne contrôlais plus rien. S’il était rentré, je ne serais peut-être pas dans cet état. Il devait revenir ce fameux lundi ou le directeur m’avait présenté Marion. Il avait repoussé. Il repoussait tous les soirs son retour. Je n’en pouvais plus.

-Tu veux dire que je te plais?

Je haussais la tête dans un signe d’assentiment.

Elle se leva et s’installa sur mes genoux, son front contre le mien. Elle m’embrassa d’abord doucement, je lui rendis son baiser et c’est finalement essoufflée qu’elle se leva en disant:

-Rendez-vous 17h30 en bas. Son ton était sans appel.

Je la laissais partir sans répondre. Je ne savais plus ou j’en étais. Mon corps en feu après plus de trois mois d’abstinence désirait cette femme. Elle me rendait dingue. Qu’allais-je dire à Mathieu? Que m’arrivait-il?

L’après-midi traîna en longueur. Le directeur qui avait eu vent des bruits de couloirs, passa la tête dans mon bureau pour me faire une réflexion. C’était plutôt pour moi une distraction bienvenue.

Mais à 17h30 tapante, j’étais près, la main sur la poignée de la porte, sans pouvoir l’ouvrir, tétanisé par la peur.

Marion s’en doutait. Elle passa me chercher. Je l’entraînais chez moi. Je n’imaginais pas ce qui pourrait bien se passer entre nous. J’aimais Mathieu corps et âmes, même si je n’avais pas de nouvelles sur son retour prochain. Je tentais de me rassurer mentalement de tout un tas de platitudes. Après tout ce n’était pas une femme qui pouvais changer ma nature.

 

Nous étions installés dans le salon, un verre de vin blanc à la main, discutant de notre vie respective. Je découvris qu’elle était mariée, mais que son mariage prenait l’eau. Elle était revenue en France pour essayer de le sauver.

Je parlais de Mathieu, de mon amour pour lui. Je lui expliquais mes craintes, mon sentiment de solitude.

La soirée se déroulait au rythme des verres que nous vidions. Nous nous comprenions. La discussion allait bon train et Marion me servait verre sur verre. Deux bouteilles vides traînaient déjà sur la table.

Mais l’alcool aidant, nos inhibitions finirent par tomber, surtout les miennes. L’abstinence que j’avais pratiquée en attendant le retour de l’être aimé, me dévastait à présent. Je n’avais plus qu’une seule envie, connaître à nouveau cette sensation charnelle qui m’avait tant manquée. J’avais besoin de contact, quel qu’il soit.

Marion m’avait retiré ma chemise, sans que je m’en rende compte. Je lui caressais les cheveux. Elle m’embrassa. J’étais gauche, je n’avais jamais connu de femme, et n’osais rien.

Je n’entendis pas la clef tourner dans la serrure, mais les pas dans le couloir m’alertèrent. Je la repoussais fermement et me levait, rougissant.

Mathieu se jeta dans mes bras sans rien voir de la scène, et m’embrassa sans retenue. Je baissais les yeux, les joues en feu sous le regard de Marion, qui s’était relevée.

-Tu m’as tellement manqué, me dit-il, alors que je le repoussais doucement. Mon esprit était en ébullition. Comment lui expliquer ce qui se passait ici, alors que je ne le savais pas moi-même, malgré les apparences? Je me sentais mal. J’avais déjà beaucoup trop bu, les pieds lourds et la tête trop légère.

Marion s’approcha de nous, me caressant le dos. Mathieu lui sourit et commença à l’embrasser, la déshabillant habilement d’une main, alors qu’il me caressait les cheveux.

Je ne comprenais plus rien. Tout tournait autour de moi. Je me laissais tomber dans le fauteuil le plus proche en grimaçant. J’avais horreur quand Mathieu le faisait. Ça abîmait l’assise.

Marion me resservit un verre de vin, alors qu’il se glissait à mes côtés pour me mordiller le lobe de l’oreille. Je m’abandonnais à ses caresses, ne voulant plus penser à rien d’autre. Je descendis le liquide clair d’une traite, alors que Marion dégrafait mon pantalon.

 

Je me réveillais le lendemain matin dans le canapé, blottis dans les bras de mon amant. Mathieu me regardait en souriant. J’avais un sacré mal de crâne, mais son baiser apaisa les élancements. Je ne me souvenais de rien de ce qui s’était passé à partir de ses premières caresses dans le fauteuil. Est-ce que j’avais rêvé? Se connaissaient-ils? Ces questions relancèrent ma migraine.

-Ouch.

Une odeur de café et de toast flottait dans l’appartement. Marion apparut dans l’encadrement de la porte de la cuisine, un verre d’eau à la main.

-Tu es réveillé, c’est parfait, le petit déjeuné est prêt, dit-elle dans un sourire.

Elle se pencha sur moi et m’embrassa, puis elle embrassa Mathieu avec la même tendresse.

Mon expression devait vouloir tout dire. Ils explosèrent de rire.

-Nous aurions dû tout te dire, mais j’avais peur de te perdre. Je sais que tu es quelqu’un de droit, et que sans alcool, tu n’aurais pas accepté tes propres sentiments aussi facilement, reprit Mathieu. Il me rappelait ainsi comment il m’avait fait admettre que je l’aimais bien des années auparavant. C’était plutôt un bon souvenir. Et j’avais déjà eu une sacré gueule de bois à l’époque, mais j’en avais au moins gardé le souvenir.

Marion me tendit un cachet et le verre d’eau avec un sourire. J’avalais le premier en buvant un peu, espérant que l’effet se ferait sentir rapidement.

-J’ai eu du mal à accepter la situation aussi, rassure-toi. Mais quand je t’ai rencontré, j’ai su que tout était possible. Mathieu n’était pas d’accord avec cette idée. Quand je lui ai dit que j’avais rendez-vous avec toi hier après-midi, il ne voulait pas le croire. Mais c’est lui qui m’a dit quoi faire, m’expliqua Marion.

-Je vous aime tous les deux et je ne veux pas vous perdre, ni l’un ni l’autre, reprit-il.

Je commençais à comprendre. Et moi qui avais eu peur quand il était arrivé! Je me redressais et me pris la tête dans les mains. Le vin blanc ne me réussissait décidément pas. Ils allaient au moins me payer cette traîtrise-là.

Je me levais sans rien dire, décidé à leur faire passer l’envie de me manipuler à nouveau. Et puis j’avais besoin de temps pour analyser ce qui se passait, ce que je ressentais. Je me dirigeais vers la salle de bain. Je voyais leur visage se décomposer au rythme de mes pas.

Je ne pouvais pas les laisser dans l’expectative plus longtemps. Je n’aimais pas faire souffrir inutilement. Je me retournais:

-Ne me faites plus jamais boire pour arriver à vos fins.

La tension se relâcha, je souris et quittais la pièce fière de moi en sifflotant.

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Bonjour ! Je découvre votre blog et je prendrai le temps de le visiter ! Pour vos nouvelles, avez vous tenter de les proposer sur le site de short édition ? Pour ma part je suis auteur de nouvelles et de romans jeunesse et je vous invite à lire une petite nouvelle si vous avez le temps ! http://www.gwen-le-tallec.fr/nouvelle-aurore-l-invisible<br /> <br /> <br /> <br /> Au plaisir de vous lire ! Gwen ou Argan !
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